L’EXTINCTION (ABSORPTION) INTERSTELLAIRE : MISE EN EVIDENCE PAR TRUMPLER EN 1930

                                     

I- Luminosité, éclat, et magnitudes : un moyen de mesure de la distance des corps célestes. 2

1) Luminosité, éclat, et distance. 2

2) Magnitudes absolue et apparente, des grandeurs utiles pour mesurer la  distance. 3

II – L’extinction interstellaire. 4

1) Shapley : les amas globulaires ou l’hypothèse d’une absorption interstellaire insignifiante. 4

2) Trumpler : les amas ouverts et la mise en évidence d’une extinction interstellaire non négligeable. 5

Conséquences de la découverte de l’extinction interstellaire. 9

 

Conséquences de la découverte de l’extinction interstellaire

 

            Au début XXème siècle, les progrès de l’astronomie permettent de développer un grand nombre d’hypothèses notamment sur le modèle galactique. Seulement, il est impératif pour ce faire de connaître les distances des étoiles ou autres formations célestes de manière exacte. Au cours de ce dossier, nous allons donc étudier les différentes méthodes de mesures de ces distances, qui par leur diversité, comme nous allons le voir, seront à l’origine d’une découverte majeure de l’astronomie du début de siècle qui bouleversa les conceptions de la Voie Lactée.

 

I- Luminosité, éclat, et magnitudes : un moyen de mesure de la distance des corps célestes.

 

         1) Luminosité, éclat, et distance

L’éclat représente la puissance de la lumière, en provenance d’une étoile ou d’un autre objet astronomique, reçue sur la terre par unité de surface : en effet, cette grandeur s’exprime en watts/m2. Cet éclat varie en fonction de la distance de l’objet étudié mais aussi en fonction de sa luminosité propre, intrinsèque. La mesure de l’éclat n’est donc pas suffisante pour obtenir la distance de l’étoile, qui nécessite donc la prise en compte de cette luminosité intrinsèque.

Cette dernière, quant à elle, s’exprime en watts et, contrairement à l’éclat, ne varie pas en fonction de la distance de laquelle on observe l’étoile puisqu’elle est inhérente à l’objet. On peut ainsi faire l’analogie avec le diamètre et le diamètre apparent : ce dernier change en fonction de la distance alors que le diamètre «réel » est une caractéristique propre de l’objet.

 

La relation vérifiée par ces grandeurs est la suivante :

                        E=L/(4πd2),

            Avec : E l’éclat de l’étoile, L sa luminosité et d la distance (en parsecs) qui sépare l’étoile de la Terre (on précise que l’éclat est mesuré avec une surface disposée perpendiculairement à la ligne de visée de l’étoile).   

 

Note : On notera également que E est une valeur corrigée, les perturbations engendrées par l’atmosphère terrestre ayant été mesurées puis incluses dans le paramètre E de manière à indiquer l’éclat qui aurait été obtenu sans perturbation. Par contre,  les perturbations hors atmosphère, qui constituent l’objet d’étude de ce dossier, ne sont pas prises en compte dans cette mesure.  

 

Ici, l’éclat et la luminosité sont « globaux » ; ils concernent l’ensemble des longueurs d’onde des radiations lumineuses, qu’elles soient visibles ou non, reçues sur la Terre pour l’éclat, et émises par l’étoile pour la luminosité.

Cependant on peut étudier l’éclat et la luminosité pour une longueur d’onde λ donnée : on aura une relation identique à la relation générale entre l’éclat et la luminosité mesurés pour cette longueur d’onde λ. Pour mesurer cet éclat, dit monochromatique, on utilise des filtres à intervalle spectral limité, c’est-à-dire qui ne laisse passer qu’un court intervalle de longueur d’ondes. L’ensemble de filtres le plus répandu est le système U, B, V, chacun des trois filtres correspondant respectivement aux radiations de longueurs d’onde 365 nanomètres (nm), 440 nm et 550 nm.     

 

 

 

 

 

 

2) Magnitudes absolue et apparente, des grandeurs utiles pour mesurer la distance

En astronomie, on utilise pour plus de commodité l’échelle des magnitudes pour indiquer la luminosité et l’éclat d’un corps : on fait correspondre à la magnitude absolue (notée M) la luminosité, et à la magnitude apparente (notée m) l’éclat, par les relations suivantes :

M = -2,5logL + C1   

m = -2,5logE + C2,

            Avec C1 et C2 des constantes déterminées par l’échelle des magnitudes choisie.  

Note : pour plus d’exactitude, on peut écrire M = -2,5log(L/4π102) + C3 où on a donc C1 = C3 + 2,5log(4π) + 5. En effet, la magnitude absolue  bolométrique  correspond à la magnitude apparente qu’aurait l’étoile si elle était située à 10 parsecs du lieu d’observation, sans bien sûr qu’aucune perturbation interstellaire quelle qu’elle soit ne vienne tronquer cette magnitude.   

 

Par la suite, on obtient donc la relation

                        m – M = -2,5logE + 2,5log(L/4π102)

                                    = -2,5log(L/4πd2) + 2,5log(L/4π102)

                                   = -2,5logL + 2,5logL + 2,5log4π - 2,5log4π + 5logd – 5log10

                                   = 5logd – 5

On appelle l’expression m -  M le module de distance.

            Pour connaître distance de l’étoile étudiée, on fait 100,2(m – M + 1)  = 10logd, d’où

d = 100,2(m – M +1)  

            Pour connaître la magnitude absolue, on utilise la magnitude absolue visuelle à laquelle on rajoute une correction due à l’énergie qui n’est pas rayonnée dans le domaine visible, énergie qui compose la magnitude absolue mais non la magnitude absolue visuelle.

La magnitude visuelle, quant à elle, est déterminée grâce à l’étude du spectre d’une étoile. A partir du type spectral et de la classe de luminosité d’une étoile, déterminés notamment par l’intermédiaire de l’intensité et les grandeurs des raies d’émission, on peut estimer la température de surface et la taille du diamètre d’une étoile, puis retrouver la luminosité et donc la magnitude absolue visuelle en utilisant la loi de Stefan.

            On remarquera que cette méthode est la seule connue pour mesurer la distance d’étoiles situées à plus de 1000 parsecs actuellement (la meilleure précision obtenue avec la méthode des parallaxes étant de 0,001’’, soit 1/0,001 = 1000 parsecs). Il est donc essentiel de s’assurer de son exactitude comme le fera Trumpler.

 

II – L’extinction interstellaire

        

1) Shapley : les amas globulaires ou l’hypothèse d’une absorption interstellaire insignifiante.

 

Avant Trumpler, la plupart des astronomes, y compris ceux qui s’intéressèrent aux dimensions de la Voie Lactée, supposèrent que la propagation de la lumière depuis les étoiles jusqu’à la Terre n’était soumise à aucune perturbation de nature à modifier l’intensité de cette lumière.

C’est en fait Shapley le premier qui a envisagé sérieusement la possibilité d’une telle absorption de la lumière stellaire avant même sa traversée de l’atmosphère. En effet, dès ses premières publications sur les magnitudes des amas globulaires au début du XXéme siècle, cet astrophysicien Américain met en évidence une légère anomalie dans les mesures qu’il effectue sur les amas globulaires. Il observe en effet un écart entre la proportionnalité qu’il relève et celle qu’il avait attendue entre le diamètre apparent d’un amas globulaire et sa magnitude apparente. Voici le raisonnement qu’il mena.

Dans un premier temps, Shapley suppose que les dimensions et les magnitudes absolues de tous les amas globulaires sont identiques, ce qui le conduit à la constatation suivante : si on observe deux amas globulaires qui ont pour différence de magnitudes apparente 1,5, on a la relation suivante, avec les indices 1 et 2 indiquant les grandeurs pour chacun des deux amas :

d1/d2 = 100,2(m1 – M1 + 1) / 100,2(m2 – M2 + 1) = 100,2(m1 – m2 +  M1 – M2 +  1 - 1)  = 100,2(1,5) ≈ 2

 

ce qui signifie qu’un gain de 1,5 magnitude correspond à un multiplication de la distance par 2. Par la suite, sachant que le doublement de la distance correspond à la division par 2 du diamètre apparent (ce qui se vérifie si on considère l’approximation tanθ ≈ θ, 2θ représentant le diamètre apparent, d’où tan θ = D/2d  et 2θ ≈ D/d, où D représente le diamètre de l’amas globulaire), il entreprend de le vérifier par les observations. C’est alors qu’il remarque que le diamètre apparent n’est pas divisé par 2 pour une augmentation de 1,5 magnitude, mais par une valeur plus faible.

Ceci le pousse à proposer plusieurs hypothèses, dont celle qu’il jugera lui-même la plus « acceptable », l’extinction interstellaire. En effet, si celle-ci augmente la magnitude apparente, une augmentation de cette magnitude mesurée de 1,5 correspondrait en fait à une augmentation réelle (s’il n’y avait pas d’absorption) plus faible, donc à une diminution du diamètre apparent plus faible également. Naturellement, cette hypothèse induit le fait que la mesure des dimensions de l’amas n’est pas troublée par l’absorption envisagée.

Malgré tout, Shapley conclura à une extinction interstellaire négligeable dans la direction  ces amas globulaires. Par ailleurs, l’étude des couleurs des étoiles d’un de ces amas par l’intermédiaire de leur spectre ne révèlera pas de rougissement, phénomène dû à l’absorption de la lumière qui s’exerce peu sur les radiations de longueurs d’onde élevées (donc situées vers le rouge et l’infra rouge). N’ayant pas décelé cet effet, qui aurait donc trahi l’existence de poussières ou autres obstacles interstellaires, Shapley est donc conforté dans ses conjectures. Et il n’eut pas tort sur ce point, mais son erreur sera de généraliser sa conclusion à toutes les directions, avançant alors la faible importance de l’absorption interstellaire, et émettant seulement quelques réserves sur des régions localisées de la voie lactée.

 

 

         2) Trumpler : les amas ouverts et la mise en évidence d’une extinction          interstellaire non négligeable.

           

            La différence majeure entre les travaux de Shapley et de Trumpler, astronome suisse, réside sans doute dans l’objet de leurs études : alors que Shapley s’était investi dans l’observation des amas globulaires, Trumpler, lui, concentrera ses recherches astronomiques (du moins celles ayant trait à l’extinction interstellaire) sur les amas ouverts. La différence la plus importante pour la détermination de l’intensité de l’extinction interstellaire entre ces deux types d’amas est leur position galactique. Ainsi, les amas ouverts, contrairement aux amas globulaires, sont situés dans le plan équatorial de la Voie Lactée, ce qui différenciera considérablement les résultats des deux astronomes.     

Cependant, c’est au moyen d’une méthode sensiblement identique à celle de Shapley que Trumpler réalisa ces observations, pour la plupart à l’observatoire de Lick, aux Etats-Unis. Partant du même type d’hypothèse, à savoir que tous les amas ouverts ont les mêmes dimensions, il a cherché à comparer les distances obtenues par la méthode du diamètre apparent et par celle des magnitudes, puis à en déduire un coefficient d’absorption interstellaire. Pour mieux expliciter la démarche de Trumpler, nous allons tenter de reproduire celle-ci à partir des données fournies pour quelques amas ouverts dans le texte intitulé Laboraory Exercises in Astronomy : Star-Cluster Distances and Dustiness of Space , en répondant notamment aux exercices proposés.

           

            A) Diamètre apparent et distance

 

Dans un premier temps, Trumpler détermina le diamètre apparent d’une centaine d’amas ouverts, afin de connaître ensuite leur distance relative, puis leur distance absolue à partir d’un amas suffisamment proche pour que sa distance puisse être mesurée par la méthode des parallaxes. Nous allons donc faire de même pour les amas des Pléiades, et les amas M34, M67, M36, M11, M103.

           

            Pour mesurer les distances à partir des diamètres apparents, on utilise la formule vue précédemment θ = D/d avec θ le diamètre apparent, D le diamètre de l’amas et d sa distance de la Terre. On a préalablement supposé que tous les amas ouverts ont le même diamètre, donc on a pour des amas d’indice 1 et 2 ; D1 = D2, d’où θ 1 X d1 = θ 2 X d2, ce qui équivaut à la relation suivante :                          d2 =  1 X d1) / θ 2

            L’amas des Hyades étant suffisamment proche pour que sa distance puisse être mesuré à partir de la méthode des parallaxes, on l’utilisera comme amas2. Ainsi, on pourra calculer non seulement la distance relative des amas par rapport à l’amas des Hyades, mais aussi leur distance absolue puisque la distance de ce dernier est connue. Il est nous est indiqué les données suivantes : dHyades = 41 parsecs et θHyades = 400’’ donc on calculera les distances à l’aide de la formule damas = (400 X 41) / θamas (distances obtenues consignées dans la colonne 3 du tableau).

                                                          

 

            B) Distance et magnitudes

 

Ensuite, Trumpler a donc cherché à déterminer la distance des amas en étudiant leurs magnitudes. On notera que si Trumpler a utilisé les diagrammes H-R (Hertzsprung-Russel) des amas ouverts pour retrouver les magnitudes absolues des étoiles puis mesurer leur distance, nous allons nous contenter de supposer que les amas ouverts ont la même magnitude absolue, ce qui est une hypothèse raisonnable si on admet que, pour des dimensions identiques, les amas ouverts sont constitués du même nombre d’étoiles. Notre utilisation des diagrammes H-R se limitera donc à la mesure des différences de magnitudes apparentes, ce qui nous permettra de la même manière que pour la méthode du diamètre apparent, de calculer les distances relatives des amas, puis à l’aide de la distance parallactique des Hyades, leur distance absolue. En considérant ces hypothèses on parvient à la formule suivante :

 

 

 

Mamas = MHyades ßà mHyades – 5logdHyades = mamas – 5logdamas ßà

10logdamas = 100,2(mamas + 5logdHyadesmHyades) ßà damas = dHyades X 100,2(mamas mHyades)

ßà damas = 41 X 100,2(mamasmHyades)

               

                Pour calculer la distance d’un amas, il est donc nécessaire de connaître la différence de magnitude apparente entre les Hyades et cet amas, différence que nous connaîtrons grâce aux diagrammes HR. Ces derniers indiquent la magnitude apparente des étoiles qui compose l’amas en fonction de leur type spectral (de O, pour les étoiles à la température effective la plus élevée, à M pour les étoiles les plus froides) : à chacune des étoiles est donc associé un point sur le diagramme.

            La majorité des étoiles d’un amas forme une sorte de bande sur le diagramme H-R, appelée « séquence principale ». On remarque donc une certaine relation entre magnitude apparente et température effective : plus les étoiles sont chaudes, plus elles sont brillantes. Seules certaines étoiles froides et brillantes se démarquent de cette séquence principale en raison de leur taille importante, d’ailleurs à l’origine de leur dénomination « géantes » rouges.

            La différence de magnitude se mesurera entre ces séquences principales et on ne tiendra pas compte de ces géantes rouges. Il suffit donc de faire en sorte que les séquences principales des deux amas se superposent (au moins en partie) tout en gardant les types spectraux des deux amas alignés. Il reste alors à mesurer l’écart entre les valeurs des magnitudes indiquées sur l’axe des ordonnées, qui correspond donc approximativement à la différence des magnitudes entre les deux amas. Ces manipulations sont représentées sur les figures ci-dessous et les résultats seront placés dans les colonnes 4 et 5 du tableau.

Une fois ces mesures effectuées, on applique la formule énoncée ci-dessus.

                                              

                         

           

           

 

            C) Déductions : l’hypothèse de l’extinction interstellaire

 

Ayant toutes les données en main, Trumpler trace alors la distance calculée à partir du diamètre apparent en fonction de la distance dite « photométrique », c’est-à-dire obtenue par la méthode des magnitudes. Là, il constate que le graphe qui correspond est une courbe, et non une droite comme il aurait dû en être le cas si toutes les hypothèses de départ étaient fondées et si rien n’était venu perturbé la mesure des distances. On peut à notre tour s’apercevoir de ce phénomène en comparant les distances trouvées avec les deux méthodes pour les 6 amas considérés : la distance photométrique est toujours plus élevée que l’autre et la proportion d’écart croit avec l’augmentation de la distance. Sur un échantillon de cette taille, on ne peut réellement généraliser à tous les amas ; Trumpler a cependant réalisé la même opération sur une centaine d’amas, ce qui confère une certaine fiabilité à ses résultats, écartant l’éventuelle incertitude qu’aurait pu engendrer une disparité dans la taille des amas.

 

Pour expliquer cette anomalie, beaucoup plus importante que celle constatée par Shapley avec les amas globulaires, Trumpler retient deux causes plausibles, avancées par Shapley lui aussi quelques mois auparavant. Ceci peut s’expliquer soit par le fait que la taille des amas augmente en fonction de leur éloignement, soit par une absorption interstellaire. La première possibilité ne paraissant pas viable, Trumpler penche pour la présence d’une sorte d’opacité de l’espace due à des poussières interstellaire. Cette hypothèse lui permet d’expliquer également le phénomène de rougissement interstellaire, en considérant que l’action de cet agent absorbant est plus importante sur les longueurs d’ondes proches du bleu que du rouge, à l’image de l’effet de l’atmosphère terrestre qui rougi le soleil lorsqu’il est à l’horizon.

           

                       

                        D) Mesure de l’absorption : la méthode de Trumpler

                                  

            Alors convaincu de l’existence de cette absorption, Trumpler cherche à la mesurer et à en déduire une règle générale. On peut faire de même en calculant l’écart entre la magnitude observée et la magnitude telle quelle aurait due être sans absorption. Pour ce faire, on considère comme Trumpler que la distance trouvée par les diamètres apparents est la distance correcte. On appelle donc mθ et dθ les magnitudes et distances supposées comme justes (sans l’absorption) et mphot et dphot les valeurs mesurées avec l’absorption. On a donc les relations suivantes : mθ - M = 5log dθ - 5

                  mphot - M  =  5log dphot - 5

            donc :  mphot  - mθ = 5log (dphot / dθ)

On calculera cette absorption puis on en déduira un coefficient d’absorption dans la direction de chaque amas puis on en fera la moyenne, ceci dans les colonnes 6 et 7 du tableau.

La valeur trouvée pour l’absorption en direction des Pléiades étant négative, on n’en tiendra pas compte, ce résultat étant sûrement à la proximité de cet amas combinée aux erreurs de mesure. Trumpler trouvera un coefficient d’absorption moyen de 0,7 magnitudes/kiloparsecs, mais comme nous l’avons indiqué plus haut sur un nombre beaucoup plus élevé d’amas (on peut aussi noter que cette valeur est inférieure aux estimations actuelles qui sont de l’ordre de 1,0 magnitudes / kiloparsecs). D’autre part, ce coefficient d’absorption moyen est peu utilisé par les astronomes, puisque l’absorption varie de manière importante selon la direction : on peut rappeler que Shapley, avec le même raisonnement, avait conclu à une absorption interstellaire négligeable car il étudiait les amas globulaires, qui se situent hors du plan galactique.

 

Cette étude des amas ouverts, que Trumpler publia dans un article sous le nom de Absorption of Light in the Galactic System   fut réellement la première preuve de l’extinction interstellaire unanimement reconnue par les astronomes.  

           

Pour mesurer l’absorption à l’aide d’étoiles individuelles et non d’amas, on utilise actuellement la méthode de l’excès de couleurs. et on mesure les variations de couleurs grâce à un ensemble de filtres. Le milieu interstellaire étant plus propice à la propagation des ondes lumineuses proches du bleu, on peut s’apercevoir d’une absorption en comparant l’intensité des radiations lumineuses de différentes longueurs d’ondes: ainsi, plus on constate de différence entre l’intensité des radiations proches de l’infrarouge et de celles proches de l’ultraviolet, plus la lumière de l’étoile observée est soumise à une absorption. Cette méthode, appliquée à de nombreuses étoiles, a notamment permis de dresser une carte de l’absorption interstellaire dans la galaxie.

 

Conséquences de la découverte de l’extinction interstellaire

 

            L’une des rares erreurs de Trumpler sera de ne pas savoir tirer les bonnes conclusions de ses observations : en effet, il profitera de cette étude complète des amas ouverts pour en déduire un modèle Galactique comme le fit Shapley, mais sans comprendre la portée de sa découverte. L’absorption interstellaire suggère ainsi clairement que le domaine de visibilité des étoiles pour les télescopes dans le domaine visible est limitée en distance (selon les calculs à environ 5000parsecs) et donc que les étoiles au-delà de cette limite ne peuvent être détectées que dans le domaine de l’infrarouge. Et pourtant, Trumpler ne fait que dénoter la « forte concentration centrale et un éclaircissement graduel avec la distance » et fixer les dimensions de la voie lactée à  « environ 2000 à 4000 parsecs ».

            Trumpler ne change donc pas sa conception héliocentrique de la galaxie, que sa découverte de l’absorption aurait pourtant dû ébranler : étant donné la distance limite à laquelle on peut distinguer une étoile dans le domaine visible, on observe forcément une distribution des étoiles de la Voie Lactée héliocentrique et circulaire, et même pourrait-on dire géocentrique. Mais puisque l’on sait que d’autres étoiles nous sont cachés, on peut d’ores et déjà mettre en doute cette conception de la galaxie, comme l’avaient fait même avant Trumpler certains astronomes, qui, au souvenir de Kepler, s’interrogeaient déjà sur la parfaite répartition héliocentrique de la galaxie. Le modèle de Shapley, qui propose que les amas globulaires soient des systèmes déconnectés de la Voie Lactée, est lui toujours rejeté par Shapley, alors qu’il expliquerait pourtant les variations d’absorption de magnitude entre les amas ouverts et globulaires.

 

 

ANNEXES

Diamètre accepté (parsecs)

3,7

3,6

6,0

5,9

5,5

5,0

Distance acceptée

(parsecs)

127

440

830

1260

1725

2450

Coefficient d’absorption (magnitudes / kiloparsec)

_

0,39

1,00

1,96

1,47

0,94

 

Moyenne : 1,27

Absorption (magnitudes)

-0,2

0,23

0,68

2,01

2,20

2,22

Distance obtenue par la méthode de la magnitude (parsecs)

148

649

896

2586

4100

6498

mamas - mHyades

2,8

6,0

6,7

9,0

10,0

11,0

Distance obtenue avec la méthode du diamètre apparent (parsecs)

164

585

656

1025

1490

2342

Diamètre apparent (minutes d’arc)

100

28

25

16

11

7

Nom de l’amas

Pléiades

M 34

M 67

M 36

M 11

M 103